La culture ne commence qu’avec l’originaire culte
C’est le culte qui célèbre et rythme la différence entre la nature et la culture. Si archaïque soit-il, le rite cultuel est praxis d’humanisation. L’homme n’est-il pas cet animal capable d’offrir en sacrifice son animalité pour s’enfanter humain ? Depuis les origines, c’est le culte qui célèbre et rythme la différence entre nature et culture. Entre la nécessité et la liberté. Entre l’ordre des choses et la création. Le culte actualise rituellement le drame bio-cosmique et la victoire de la vie sur la mort. Les rites structurent l’espace, le temps, l’être et l’action cohérente des hommes. Ainsi les rites de passage qui président au devenir personnel et aux fonctions sociales. Ainsi les rites de la végétation qui donnent naissance à l’agriculture. Ainsi les rites totémiques qui président à la domestication des animaux. Ainsi les rites du feu sans lesquels la métallurgie n’aurait jamais commencé.
C’est dans le rite sacrificiel - sacrum facere - que la crise sacrale s’actue de façon extrême. Dès ses formes les plus archaïques se rejoue la crise sans laquelle l’humain ne serait pas. Ici se révèle la profonde dialectique sacrale. La traversée de la négation vers l’autre. Du bon est détruit pour qu’un meilleur soit. De la valeur est immolée pour que dans sa béance se manifeste une autre et plus grande valeur. On sacrifie de la vie pour vaincre la mort. Dans l’extrême rupture advient une plus extrême plénitude. Dans la tension paroxismale de la lutte et de l’étreinte hiérogamique sous le signe d’éros et de thanatos. Le sacrifice actualise cette mystérieuse dialectique à travers laquelle la libre mise à mort d’un vivant devient victorieuse de cette mort elle-même.
Réactualisation de la victoire originaire où la vie passe par la mort pour revivre plus immortelle. L’homme émerge avec le savoir inconscient de cette victoire originaire. Son culte, si ‘primitif’ soit-il participe de l’originelle bio-gonie et en actualise