La distinction de la règle de droit et de la morale

« Parmi les force sociales dont l’action produit le droit, certaines sinon toutes se servent de valeurs morales comme d’un levier, de sorte que le droit en porte ensuite la marque ». Par ces mots, Ph. Jestaz point du doigt, dans un article intitulé « Pouvoir juridique et pouvoir moral », une question fondamentale de la théorie général du droit : celle de la distinction de la règle de droit et de la morale.
Par définition la règle de droit s’entend d’une règle de conduite dans les rapports sociaux, générale, abstraite et obligatoire, dont la sanction est assurée par la puissance publique. La morale se définit, elle, comme la science du bien et du mal, la théorie de l’action humaine en tant qu’elle est soumise au devoir et a pour but le bien. Elle constitue un ensemble de règles de conduite considérées comme bonnes de façon absolue. La distinction, enfin, consiste en une action d’analyser et de spécifier, de différencier, séparer, lever une équivoque ou dissiper une confusion. Un critère distingue fondamentalement les deux notions : la morale s’adresse à l’individu, en son for intérieur et tend vers son perfectionnement, alors que le droit n’a pas cette vocation, en ce qu’il prétend seulement trancher des conflits d’intérêts. Toutefois, il ressort également de la confrontation de ces notions une ressemblance : droit et morale sont tous deux composés de règles de conduite.
En regardant à travers l’histoire, l’idée se vérifie : aux époques où la religion était prégnante, la distinction n’avait pas lieu d’être. Par ailleurs, au-delà de la religion, c’est également la coutume que nous devrons envisager, en ce qu’elle était – est toujours ? – intimement lié à l’une comme à l’autre de ces règles de conduite. De la même manière, la possibilité pour un juge de statuer en équité sera également l’occasion de s’interroger sur la pertinence de la distinction. Ainsi posé, le sujet implique que soient abordés des