La politique sociale des 35 h
Depuis le 1er janvier 2000, la durée légale du travail en France est fixée à 35 heures par semaine. Cette réforme sociale qui résulte des lois Aubry I et II et de leurs nombreux textes d’application a profondément modifié les modalités d’organisation du travail dans le pays. Depuis il ne cesse de s’animer un large débat sur les conséquences des 35 heures et sur la possibilité de les réformer dans l’avenir. Plusieurs réformes ont été effectuées depuis 2003 mais la controverse a surtout refait surface cet été avec l’adoption d’un nouveau projet de loi qui favorise, une fois de plus, le dépassement des 35 heures légales de travail hebdomadaire (Dayan et Erhel 2005, 1). Cependant, après un siècle d’accumulation de politiques sociales, toute nouvelle initiative se trouve enchâssée dans un ensemble complexe d’institutions et de politiques publiques héritées du passé. C’est ce que les néo-institutionnalistes ont appelé le phénomène de path dependency et de rétroaction politique : les mesures sociales existantes sont de plus en plus intériorisées dans la sphère publique et privée ce qui freine généralement les projets de réformes qui tentent de s’imposer par la suite. Il est donc pertinent de se demander dans quelle mesure la dernière loi adoptée en juillet 2008 sur le temps de travail a-t-elle permis de contourner la logique d’institutionnalisation des 35 heures en France. Pour ce faire, nous examinerons d’abord comment la politique de réduction du temps de travail (RTT) s’est institutionnalisée dans le quotidien de tous les travailleurs français afin d’analyser par la suite les divers obstacles que les « réformateurs » des 35 heures ont rencontré cet été. Enfin, nous verrons que cette politique sociale profondément ancrée dans le marché du travail peut quand même évoluer et être modifiée à travers diverses réformes successives mais sans