le jardin d'autan
Le sentiment d’amertume
Ce constat tient essentiellement à la nostalgie, à la fuite du temps et à un état perdu, l’enfance, sur lequel on se retourne de loin en loin, sachant que rien ne vous rapprochera du bonheur et de l’innocence connus alors. Toute la démarche est orientée vers cette reconquête du paradis perdu comme un projet à réaliser. Au-delà de cette volonté, vit un lieu mythique dont le poète a réminiscence et qu’il cherche à rejoindre par le biais du songe. Le choix d’une telle attitude laisse une étrange impression de regret :
« Mais rien n’est plus amer que de penser aussi A tant de choses ruinées ! » (« Le jardin d’antan »).
Les images reviennent, s’entassent : celles des sœurs d’Emile, du chat, des poupées jetées. Les souvenirs du Sine resurgissent : les festins funèbres, les visites du roi Koumba N’Dofène, les rhapsodies de griots [22]. Le temps passe, il remonte dans la mémoire à savoir l’histoire, l’exaltation du passé. De cette perte, le poète va tirer la force qui saura infléchir sa création. Nelligan puise dans le registre et les ressources de cette réalité une inspiration lui permettant de retrouver une part de lui-même. Il s’agit également, pour Senghor, de chercher dans cet univers quelque chose qui lui ferait éprouver un sentiment de retrouvailles avec les « racines africaines » [23]. L’attachement au bon vieux temps et à la réactualisation des valeurs de civilisation parait primordial. Le poète se laisse entrainer pour en extraire le récit d’une déchirure identitaire. La blessure ne cicatrise pas et elle explique, à