Le juge et l’intangibilité du contrat
L’influence du droit canon sur le droit commun est assez évidente à la lecture de notre Code civil. En effet, on y retrouve de nombreux éléments chers à la matière, tels l’honnêteté ou le respect de la parole donnée. En outre, c’est sans doute sous l’influence de ce droit que les rédacteurs du Code ont écrit l’article 1134, qui dispose dans son alinéa premier que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». Ainsi, à partir du moment où le contrat respecte l’ordre public et les bonnes mœurs, les contractants sont tenus par leur accord qui est alors, pour eux, assimilable à une loi. Ils commettraient dès lors une faute en ne respectant pas leurs obligations, faute qui serait susceptible d’entraîner leur responsabilité contractuelle. La formule de l’article 1134 marque donc bien la force des obligations nées de l’accord des volontés : il s’agit de la force obligatoire du contrat, d’où découle son intangibilité. Cependant, un contrat comportant des clauses peu claires, ou passé avec un cocontractant peu fiable peut être source de litige et va demander la participation du juge. Le juge, serviteur de la loi, va alors devenir serviteur du contrat : il va prendre en compte les volontés souveraines des parties pour mieux les servir et régler le litige en requalifiant le contrat, en l’interprétant mais parfois même en le révisant. Or le fait même de réviser le contrat ne contredit-il pas la force obligatoire du contrat théorisée à l’article 1134 du Code civil ? En effet, si l’on maintient la comparaison du contrat à la loi des parties, le juge a alors le pouvoir de réviser la loi ! De ce fait, si la loi change de par la bouche du juge, les parties ne sauraient respecter à la lettre le contrat qu’elles ont formé. Mais afin de régler les conflits, le juge va devoir opposer à ce principe de nombreux tempéraments. Comment alors concilier le principe de l‘article 1134 et la