Le luxe
Créer des produits en espérant que le marché les adoptera, les diffuser tout en préservant leur rareté, les promouvoir sans se compromettre, satisfaire sa clientèle sans espérer nécessairement la retenir... Le marketing du luxe n'est pas à l'abri des contradictions.
BERNARD DUBOIS
Le marketing du luxe s'est considérablement démocratisé au cours des vingt dernières années. Jadis réservés aux « happy few », les produits et services de luxe sont progressivement « descendus dans la rue » et, pour certains d'entre eux (parfums et eaux de toilette, accessoires de mode), désormais achetés et consommés, ne serait-ce qu'occasionnellement, par le plus grand nombre. Ainsi, selon les données de l'Institut Risc, plus d'un Européen sur deux a acheté une marque de luxe au cours des douze derniers mois.
On pourrait croire qu'en se démocratisant le marché du luxe a perdu de sa spécificité et que, ce faisant, son marketing ne se distingue plus guère du marketing des produits et services de grande consommation. De fait, certains groupes de luxe comme LVMH ont fait appel, le plus souvent avec succès, à des talents marketing issus de l'agroalimentaire ou des produits d'entretien.
A l'analyse, il apparaît cependant que certains aspects du marché du luxe conservent une originalité qui, mettant en cause quelques principes de base du marketing, confère au marketing du luxe un caractère profondément paradoxal. Nous illustrons dans ce qui suit les cinq principaux paradoxes du marketing du luxe.
Paradoxe de la demande
Le succès du marketing des biens de grande consommation repose en grande partie sur une gestion maîtrisée des cycles de rachat. C'est pourquoi la plupart des entreprises accordent aujourd'hui tant d'importance à la fidélisation de leur clientèle.
Paradoxalement, en se démocratisant, le luxe est devenu de plus en plus tributaire de situations particulières d'achat et de consommation. Jadis alimenté