Le lyrisme
La poésie lyrique est souvent définie comme le genre littéraire qui accueille l’expression personnelle des sentiments du poète. L’auteur lyrique parle en effet en son nom propre; il dit “je”. Cette définition, toutefois, est insuffisante, en ce qu’elle néglige deux autres composantes essentielles du lyrisme qui sont la recherche de la musicalité et la visée de l’idéal. Il convient donc plutôt de percevoir celui-ci comme l’expression d’un sujet singulier qui tend à métamorphoser, voire à sublimer le contenu de son expérience et de sa vie affective, dans une parole mélodieuse et rythmée ayant la musique pour modèle.
La poésie lyrique doit en effet son nom à la lyre qui, dans l’Antiquité, accompagnait ses chants. Symbole d’unité et d’harmonie, cet instrument apollinien prend dans le mythe d’Orphée une valeur pacificatrice. Capable de suspendre les supplices des Enfers, il devient le modèle des pouvoirs de la poésie et des liens étroits qui l’unissent à la destinée de la créature humaine.
I. EVOLUTION HISTORIQUE
Le lyrisme apparaît en France, au Moyen-âge, à travers une myriade de formes associant le plus souvent au poème la musique et la danse : chansons de toile, pastourelles, sérénades, ballades, cansos, tournois, tensons, lais et virelais fleurissent dans le chant des trouvères et des troubadours. Bernard de Ventadour (1150-1200), Richard Coeur-de-lion (1157-1199) et Thibaut de Champagne (1201-1253) comptent parmi les nombreux représentants de ce lyrisme ancien. L’amour courtois est alors le thème dominant des oeuvres les plus savantes, qui se partagent entre intimité et virtuosité. Le jeu codifié l’emporte sur l’expression authentique. C’est dans la seconde moitié du XIIIème siècle, notamment avec Rutebeuf, que le lyrisme entreprend de se dégager de ses stéréotypes. Au XVème siècle, Charles d’Orléans (1391-1465) et François Villon (1431≈1463) imposent deux voix mélancoliques aux