Le transfert de garde d'une chose
Le Big Bang qui affecte le droit des affaires en cette fin de siècle prolonge bien loin ses effets. Il détruit certaines constructions fondamentales du droit et les recompose à sa manière. Tel est le cas de la notion et du droit traditionnel de la personnalité morale. Pour comprendre ces bouleversements, pour retrouver une logique et une cohérence perdues, peut-être convient-il de revoir cette construction avec un regard entièrement neuf.
1. Le droit moderne de la personnalité morale est marqué par une opposition entre une jurisprudence traditionnelle et constante de la Cour de cassation, fidèle à la théorie de la réalité de la personnalité morale, et une évolution récente et très profonde de la notion et du droit de la personne morale en législation.
2. Selon la Cour de cassation : « La personnalité civile n'est pas une création de la loi ; elle appartient, en principe, à tout groupement pourvu d'une possibilité d'expression collective pour la défense d'intérêts licites, dignes, par suite, d'être protégés ». C'est une position de principe.
La personnalité morale est le moyen pour un groupement de personnes d'accéder à la vie juridique. Il peut ainsi, en tant que tel, faire des actes juridiques, conclure des conventions, intenter des actions en justice, défendre des intérêts collectifs ; en bref, il peut avoir et exercer certains droits comme les personnes physiques.
Certes, la personnalité morale n'appartient pas à n'importe quel groupement de personnes. Seul peut en bénéficier celui qui présente les caractéristiques soigneusement précisées par la Cour de cassation : a) « possibilité d'expression collective » ; b) « pour la défense d'intérêts licites, dignes, par suite, d'être protégés ». Mais, dès qu'il satisfait ces conditions, un groupement de personnes a la personnalité morale.
Il découle également de cette position que la raison essentielle - unique - de l'existence de la personnalité morale est de permettre l'expression juridique