Les sciences humaines peuvent elles adopter les méthodes des sciences de la nature ?
Quand Sigmund Freud, entre 1915 et 1917, prononce à l’Université de Vienne ses vingt-huit conférences afin d’exposer à un public « profane » ce qu’est la psychanalyse, il précise dès les premières pages que quiconque souhaiterait s’engager à défendre la psychanalyse doit savoir travailler humblement sans attendre une quelconque reconnaissance. En effet, il explique que la société n’est pas prête à reconnaître la psychanalyse comme science. Aujourd’hui, le problème que posent les « sciences humaines » reste inchangé. Cette expression, que Michel Foucault préfère laisser entre guillemets tant la terminologie est problématique, désigne un ensemble de disciplines scientifiques qui étudient les aspects sociaux des réalités humaines. Ces sciences ont pour objet d’étude ce qui concerne les cultures humaines, leur histoire, leurs réalisations, leurs modes de vie et leurs comportements individuels et sociaux. Le principal problème qu’elles posent réside dans la méthode à suivre afin d’atteindre une objectivité relative à l’espèce humaine. De plus, les nombreuses disciplines qui composent les sciences humaines sont extrêmement diversifiées : on y trouve l’Histoire, la sociologie, la linguistique, la théologie, l’anthropologie, la philosophie, la géographie… Et la liste est encore longue. Cette hétérogénéité pose donc la question de savoir quel est le point commun à toutes ces disciplines. Pour comprendre l’enjeu de ces difficultés, nous opposons souvent les sciences humaines aux sciences de la nature, qui ont pour objet le monde naturel (comme la chimie, la physique, les sciences de la Terre, les sciences de la Vie et les sciences de l’Univers), et qui utilisent des méthodes très proches de celles des sciences formelles. Ce qui légitime leur statut de « science » est précisément cette instrumentalisation que les sciences humaines ne connaissent pas. Nous pouvons donc nous demander si ces