les trois voies du dialogue de Raymond Lulle
1.
Lorsque j’ai commencé à écrire ce petit texte ma tentation a été celle de paraphraser la fameuse exclamation de Geronte dans le fourberies de Scapin: «Mais qu’est-ce que je suis venu faire dans cette galère. »
En effet je me sens obligé des vous avouer que, le fait que le Comité organisateur ait voulu m’honorer en m’attribuant la Présidence du premier groupe de travail, ne signifie pas que ma connaissance de la pensée de Raymond Lulle soit à la hauteur de celle des membres de ce groupe de travail que je suis supposé diriger.
Je me suis en effet occupé de Raymond Lulle dans le passé dans deux occasions seulement, et toujours dans des perspectives très limitées:
Tout d’abord lors d’un travail sur les projets de reconquête de la Palestine, qui ont foisonné après la chute en 1291de S.Jean d’Acre, et la deuxième fois à l’occasion d’une recherche sur la voie mystique de l’alchimie arabe et l’alchimie occidentale .
Je rappelle juste un instant la question de la reconquête de la terre sainte. Raimond Lulle présente au Concile de Vienne de 1311 une « Petitio Raimundi in concilio generalis ad acquirendam terram sanctam ». Il propose une action armée, qui devrait être menée via l’Egypte et conduite particulièrement par les ordres militaires reformés (on considérait généralement que une des causes de la chute de ce qui restait encore du Royaume de Jérusalem était la corruption des ordres militaires et surtout leurs jalousies et rivalités). Jusqu’ici rien d’original, mais Lulle ajoute à son projet un autre élément, déterminant dans toute son oeuvre: le but de l’opération militaire n’est pas uniquement l’occupation de la Palestine, mais surtout la prédication et la conversion des musulmans.
Comme dans d’autres domaines Lulle se place dans une position intermédiaire entre passé et avenir : déjà à partir de la XIII siècle se développe une littérature de critique à l’égard de l’aspect militaire des croisades, (voir