Malgré la crise, le dollar résiste à l’euro
Malgré la crise, le dollar résiste à l’euro
Par PHILIPPE MARTIN professeur à Sciences-Po.
Bien avant la crise financière, des économistes ont prédit le scénario catastrophe d’une chute brutale du dollar déclenchée par une vague de défiance vis-à-vis des actifs américains. Le scénario catastrophe s’est bien réalisé, mais pas là où on l’attendait : paradoxalement, au cœur de la crise financière qui trouvait son origine aux Etats-Unis, le dollar s’est apprécié. Pendant la phase de panique, celui-ci a retrouvé son rôle de valeur refuge. Un véritable phénomène de dé-globalisation financière a fait s’effondrer les mouvements de capitaux et rapatrier les investissements américains à l’étranger. Avec la fin de la panique financière, le mouvement à la hausse du dollar s’est inversé : depuis mars il s’est déprécié de 20 % par rapport à l’euro.
La question de la faiblesse du dollar revient donc au-devant de la scène avec un euro autour de 1,50 dollar. Les déterminants «normaux» des taux de change reprennent le dessus : l’injection massive de liquidités et les taux d’intérêt quasi nuls aux Etats-Unis (contre 1 % en zone euro) expliquent ainsi l’attrait actuel de la devise européenne. L’euro fort vient à un bien mauvais moment pour l’Europe et la France en début de sortie de crise. Les exportations devaient aider au regain de croissance espéré pour 2010. Or les derniers chiffres sur les exportations de la zone euro et de la France sont très mauvais : les chiffres d’août montrent une baisse de 6 % pour la zone euro et de 3 % pour la France.
Que va-t-il se passer pour les exportateurs français dans les mois qui viennent ? Lorsque l’euro s’apprécie, les entreprises ont deux possibilités. Elles peuvent laisser le prix de leurs produits augmenter en dollar (la conséquence naturelle de l’appréciation de l’euro) et accepter, du coup, d’exporter moins et de perdre des parts de marché (qu’elles ne retrouveront peut-être jamais). Elles peuvent