Mercel Proust et l espace maison
INTRODUCTION
Ce travail vise à explorer la représentation de l'espace dans « Combray », premier chapitre de
Du Côté de chez Swann de Marcel Proust, qui introduit ainsi l’ensemble de l’œuvre que constituent les sept tomes d’À la recherche du temps perdu. Nous tentons d’y montrer que l’interrogation sur le temps, objet central de la Recherche, passe d’abord par une interrogation sur l’espace, et que cette dimension spatiale de l’œuvre, qui s’exprime fondamentalement sur le mode de l’incertain, cristallise le questionnement identitaire du narrateur. En mettant en scène des espaces toujours mouvants, vagues, intermédiaires, Proust incarne le tâtonnement du travail de réminiscence. L’entre-deux géographique devient la métaphore de l’entre-deux du sens. C’est cette hypothèse que nous essaierons ici d’éprouver, à travers l’analyse d’un certain nombre d’espaces qui structurent la narration de ce premier chapitre.
I. Combray
Le narrateur voit Combray comme une entité spatiale incertaine qui déclenche chez lui des sentiments mêlés et instables à la fois. Malgré la tristesse que cette ville évoque pour lui, il vit douloureusement son départ à la fin de son séjour, dans une certaine confusion des sentiments : « À l’habiter, Combray était un peu triste [...] »1, « Ô mes pauvres petites aubépines, disais-je en pleurant, ce n’est pas vous qui voudriez me faire du chagrin, me forcer à partir. »2 Cette ambivalence apparaît quand le narrateur symbolise Combray par le vent. Il identifie sa présence, dès son arrivée à
Combray, par la présence du vent en le cherchant ou en le repérant dans la ville. Ce qui est évident, c'est que la présence du vent caractérise l'instabilité de l'espace, il est orageux, son caractère mobile provoque l'inquiétude, l'incertitude, et la peur de l'inconnu3. Cela signifie que cette ville ne possède pas d'aspect stable pour le narrateur comme si elle était un espace inquiétant pour lui : « par le vent qui était pour moi le génie particulier de Combray.