Modernité d'alcool
Dans le numéro du 6 juin 1913 de la revue Le Mercure de France, Georges Duhamel, poète et écrivain, écrit :
« Rien ne fait plus penser à une boutique de brocanteur que ce recueil de vers publié par M. Guillaume Apollinaire sous un titre à la fois simple et mystérieux : Alcools.
Je dis : boutique de brocanteur parce qu'il est venu s'échouer dans ce taudis une foule d'objets hétéroclites dont certains ont de la valeur, mais dont aucun n'est le produit [ du ] (…) marchand même. »
Dans le numéro suivant, vous réagissez à cette critique en manifestant votre désaccord de façon argumentée
Dans ce nouveau numéro, je souhaiterai réagir à la critique de M. Georges Duhamel, critique publiée dans le numéro précédent et s'adressant au recueil poétique publié par M. Guillaume Apollinaire cette même année.
Il est vrai que ce nouveau recueil de poèmes a provoqué une grande surprise, et un grand étonnement a surgit dans l'esprit de nos concitoyens français. En effet, comment ne pourrions nous pas être stupéfaits face à l'extrême diversité de ce recueil. C'est probablement cette diversité que critique d'ailleurs mon confrère Duhamel, employant l'expression symbolique : « boutique de brocanteur parce qu'il est venu échouer dans ce taudis une foule d'objets hétéroclites ». Il est vrai que l'ensemble des poèmes de M. Apollinaire se distinguent par leur grande diversité.
Cette diversité s'inscrit tout d'abord dans les thèmes des différents poèmes. Ainsi, alors que « Le Pont de Mirabeau » nous permet de nous pencher sur la fuite inexorable du temps, le poème précédent, nommé « Zone », nous donne une nouvelle définition de la ville moderne. Il me semble important également de noter la diversité dans la construction des poèmes. Ainsi, il ne vous aura pas échappé que peu de ces poèmes respectent des règles poétiques, comme la longueur des vers qui est bien souvent supérieure à l'alexandrin. Ce non respect de nos anciennes règles classiques se voit particulièrement