montaigne
Ce chapitre vaut à Montaigne sa réputation d’esprit éclairé : il y traite des malheurs de l’histoire de l’humanité en évoquant à nouveau l’opposition entre les Indiens, ici raffinés et incarnant les valeurs antiques, et les conquistadors espagnols, traitres, cruels et avides.Montaigne s'illustre dans ce texte par son humanisme, mouvement auquel il appartient. « Notre monde vient d'en trouver un autre (et qui nous répond si c'est le dernier de ses frères, puisque les démons, les sibylles et nous, avons ignoré celui-ci jusqu'à cette heure ?) non moins grand, plein et membru que lui, toutefois si nouveau et si enfant qu'on lui apprend encore son a, b,c ; il n'y a pas cinquante ans qu'il ne savait ni lettres, ni poids, ni mesure, ni vêtements, ni blés, ni vignes. [...] Bien crains-je que nous aurons bien fort hâté sa déclinaison et sa ruine par notre contagion, et que nous lui aurons bien cher vendu nos opinions et nos arts. C'était un monde enfant ; si ne l'avons-nous pas fouetté et soumis à notre discipline par l'avantage de notre valeur et forces naturelles, ni ne l'avons pratiqué par notre justice et bonté, ni subjugué par notre magnanimité. La plupart de leurs réponses et des négociations faites avec eux témoignent qu'ils ne nous devaient rien en clarté d'esprit naturelle et en pertinence. L’épouvantable magnificence des villes de CUSCO et MEXICO, et, entre plusieurs choses pareilles, le jardin de ce roi, où tous les arbres, les fruits et toutes les herbes, selon l’ordre et grandeur qu’ils ont en un jardin, étaient excellemment formés en or ; comme, en son cabinet, tous les animaux qui naissaient en son Etat et en ses mers ; et la beauté de leurs ouvrages en pierreries, en plume, en coton, en peinture, montrent qu’ils ne nous cédaient non plus en industrie.
Mais, quant à la dévotion, observance des lois, bonté, libéralité, loyauté, franchise,