Poesie et reve - xx siecle
À compter du romantisme s’établissent de nouveaux rapports entre le rêve et la vie éveillée, la poésie se donnant pour mission d’aller plonger dans la nouvelle forme de connaissance en partie refoulée par le privilège des Lumières et de la Raison. Albert Béguin rappelle que si les romantiques « ont renouvelé profondément la connaissance du rêve et lui ont conféré une place privilégiée, on commet une erreur de perspective en supposant qu’ils ont été les premiers à s’y intéresser et à en faire un objet d’études psychologiques » (L’Âme romantique et le rêve). Rappelons donc que l’occultisme, les écoles psychologiques du XVIIIe siècle, et plus avant encore toute une tradition occulte et en partie occultée a favorisé la plongée dans les sources vives du rêve. Il reste que la réhabilitation de la part nocturne demeure l’apport majeur du romantisme, et l’une des sources les plus fécondes d’une modernité qui passera à travers Nerval notamment, puis le dérèglement rimbaldien des rapports entre l’imaginaire et ce qu’il est convenu d’appeler le « réel », jusqu’à l’héritage surréaliste. Les bornes du programme « du romantisme au surréalisme » correspondent précisément à un tel objet d’étude, d’où l’intérêt d’étudier l’apport du songe, la valeur de l’imaginaire, les esthétiques et les fonctions de la poésie qui en découlent dans la période où la réhabilitation des rêves comme « seconde vie »
(Nerval) conduit à redéfinir le genre poétique, ses formes, ses valeurs et ses apports à la pensée comme à la condition humaine. C’est au nom du songe éclairant les dessous mystérieux du monde que le romantisme crédite le poète d’une mission de « voyant » ; c’est parce que « l’imaginaire est ce qui tend à devenir réel » (Breton) que la revue La Révolution surréaliste réclamera, en libérant les esprits par la poésie, « une nouvelle déclaration des droits de l’Homme ».
Deux perspectives, complémentaires plutôt qu’antagonistes,