Préface de andromaque
«O felix una ante alias Priameia virgo, Hostilem ad tumulum, Trojae sub moenibus altis, Jussa mori ! quae sortitus non pertulit ullos, Nec victoris heri tetigit captiva cubile. Nos, patria incensa, diversa per aequora vectae, Stirpis Achilleae fastus juvenemque superbum, Servitio enixae, tulimus, qui deinde secutus Ledaeam Hermionem, Lacedoemoniosque hymenaeos... Ast illum, ereptae magno inflammatus amore Conjugis, et scelerum Furiis agitatus, Orestes Excipit incautum, patriasque obtruncat ad aras».
Voilà, en peu de vers, tout le sujet de cette tragédie. Voilà le lieu de la scène, l'action qui s'y passe, les quatre principaux acteurs, et même leurs caractères. Excepté celui d'Hermione, dont la jalousie et les emportements sont assez marqués dans l'Andromaque d'Euripide.
Mais véritablement mes personnages sont si fameux dans l'antiquité que, pour peu qu'on la connaisse, on verra fort bien que je les ai rendus tels que les anciens poètes nous les ont donnés. Aussi n'ai-je pas pensé qu'il me fût permis de rien changer à leurs moeurs. Toute la liberté que j'ai prise, ç'a été d'adoucir un peu la férocité de Pyrrhus, que Sénèque, dans sa Troade, et Virgile, dans le second (livre) de l'Enéide, ont poussée beaucoup plus loin que je n'ai cru le devoir faire.
Encore s'est-il trouvé des gens qui se sont plaints qu'il s'emportât contre Andromaque, et qu'il voulût épouser cette captive à quelque prix que ce fût. J'avoue qu'il n'est pas assez résigné à la volonté de sa maîtresse, et que Céladon a mieux connu que lui le parfait amour. Mais que faire ? Pyrrhus n'avait pas lu nos romans. Il était violent de son naturel.