Marie Benoit, Petit précis de méthodologie appliquée à la philosophie, partie II, Starno éditeur, Ste-Julie (Qc), 2002, pp.86-90 (extrait) 5.2 Ce qu’est l’essai L’essai constitue probablement le genre littéraire le moins connu du grand public, tant et si bien que, devant la nécessité de le définir, on est souvent porté à en donner une définition négative : un essai n’est ni un roman, ni un poème, ni une pièce de théâtre. Mais une telle définition, si juste soit-elle, ne satisfait pas celui qui cherche à préciser ce qu’est, à proprement parler, l’essai, surtout s’il est appelé à en rédiger un. Il faut don, ici, être plus précis. Le terme d’«essai», au sens de genre littéraire, apparaît au XVIe siècle pour désigner les premières productions littéraires d’une personne, ses premières tentatives. Le terme s’est ensuite figé pour désigner « un ouvrage littéraire en prose, qui traite d’un sujet sans viser à l’exhaustivité »1. La matière de l’essai n’est pas une fiction inventée par l’auteur – comme c’est le cas pour d’autres genres littéraires -, mais prend racine dans la réalité. Tenter de réfléchir sur un problème, chercher à élucider une question obscure, voilà bien ce qui caractérise le projet de l’essayiste. L’essai n’a pas de sujets de prédilection : on peut y traiter de choses graves et élevées ou de réalités banales et de sujets légers2. L’essai fait partie de ce qu’on appelle la « prose d’idées », et la recherche de la vérité constitue l’essentiel de la tâche de son auteur. L’essayiste se propose d’aborder de façon personnelle un sujet d’intérêt général et d’y réfléchir. L’auteur d’un essai adopte une attitude plus proche de l’interrogation et de la spéculation que de la certitude : il choisit la position plutôt insécurisante et inconfortable de celui qui pense plutôt que la position rassurante de celui qui sait. L’écriture de l’essayiste n’est pas définitive parce que sa mission n’est pas tant d’apporter une solution que de circonscrire un problème et de se