Spinoza ttp, notes chapitres xvi et xx
On atteint au cœur du chapitre XVI un § qui a un sens et une portée politiques extraordinaires. Il énonce et commente les termes d'un pacte (pactum) par lequel seul chacun (unusquisque) s'unissant (coetus) avec les autres forme une société (societas) où il est tenu d'obéir sans que pour autant soit nié son droit de nature. Non seulement ce problème difficile, presque autant que la quadrature du cercle, a une réponse, qui s'appelle la démocratie, mais la solution énoncée ici aura manifestement des lecteurs, qui s'en inspireront sans le dire, car il est toujours mauvais, même longtemps après, de reconnaître ce qu'on doit au juif athée de Voorburg ou simplement de se vanter de l'avoir lu.
Le problème se pose de la manière suivante. La liberté qu'a chacun de penser ne saurait être entravée par la théologie, cela a été établi par les quinze chapitres précédents. Mais ce que l'autorité religieuse ne peut empêcher, rien ne dit encore que l'autorité politique ne s'y opposera pas légitimement. La question est donc de savoir jusqu'où l'Etat peut autoriser la liberté de pensée. Pour commencer d'y apporter une réponse, il faut examiner les fondements de l'Etat. Ayant formulé son problème, l'auteur en donne la solution. Chacun transfère (transferat) à la société seule toute la puissance (potentia) qui lui appartient de nature. Telle est " la condition suivant laquelle une société peut se former sans que le Droit naturel y contredise le moins du monde ". A première vue ce transfert par chacun de ce qui lui appartient de nature semble peu favorable au maintien de la liberté de pensée. Mais il ne faut pas en juger trop hâtivement ; et seul le dernier chapitre prononcera la conclusion.
Il faut auparavant bien comprendre ce qu'est le droit naturel. Le droit naturel ne saurait être déterminé, ce qui est recevoir un terme, par une conception quelconque que le premier philosophe venu se ferait de la nature. Il ne peut être question de produire ici un catalogue des droits