SYNTHESE
“Les ratés de l’âge industriel”
Le XIXe siècle siècle a vu naître en Angleterre, et s’imposer dans toute l’Europe, une révolution sans précédent : le fer et le charbon sont devenus les moteurs de l’activité économique. Mais l’industrialisation n’est pas forcément synonyme de prospérité.
Le siècle de la “révolution industrielle”, siècle explosif de la vapeur, du coton et du rail, siècle du machinisme et du capital en majesté, pourrait-il être un siècle de déclin économique ?
Le paradoxe n’est qu’apparent : il ne faut pas oublier que la “révolution” industrielle fut certes synonyme de croissance, mais d’une croissance dont l’exceptionnalité, à l’échelle historique, tient surtout au fait qu’elle a été plus continue que rapide.
Au total, et par tête, la croissance moyenne annuelle du produit intérieur brut (PIB) de l’ensemble des pays industrialisés n’a guère dépassé 1 % durant ces cent ans, ce qui, dans le court terme, est quasiment imperceptible. D’autre part cette croissance fut incertaine, hachée par de nombreuses crises (celles de 1816, 1825, 1836, 1846, 1857, 1866, 1873, 1882, 1890, 1900), et une phase de ralentissement marqué, la “grande dépression”, qui dura des années 1870 aux années 1900, a donné aux contemporains le sentiment qu’ils approchaient d’un “état stationnaire” considéré comme une “loin de civilisation”.
Cette expression d’ “état stationnaire”, Paul Leroy-Beaulieu, l’un des économistes les plus écoutés de son temps, expliquait en 1896 qu’elle “ne [devait] pas être entendue dans un sens absolu ; elle serait fausse, parce que les inventions mécaniques et les découvertes scientifiques ne s’arrêteront pas, parce qu’il y aura toujours quelque emploi utile, mais d’une utilité moindre, pour les nouveaux capitaux ; mais, ajoutait-il, l’expression “état stationnaire” est vraie dans un sens relatif qui veut dire que cet état ne comporte que des améliorations de détail, lentes et médiocres, au lieu de ces soudaines, générales et