texte philosophie morale
Situation 2. Le dispositif expérimental de Stanley Milgram
Extraits du livre de Terestchenko, Un si fragile vernis d’humanité.
Étant admis que, dans notre civilisation, de tous les principes moraux celui qui interdit de faire souffrir un innocent est le plus universellement accepté comme une norme inviolable, aussi bien par les individus que par les systèmes juridiques des États, la question est de savoir s'il est cependant assez puissant pour empêcher que des hommes obéissent à des ordres qui exigent d'eux qu'ils le transgressent ouvertement. Mais la question même mérite-t-elle d'être posée? Tout porte à croire que des individus confrontés à un tel dilemme feraient le choix de la désobéissance plutôt que de contrevenir à un impératif catégorique si évident pour tout un chacun, quels que soient son niveau d'éducation ou la place qu'il occupe dans la société. « Tu ne feras pas de mal à un innocent » est un principe dont la force d'inhibition se trouve peutêtre levée dans des cas exceptionnels de folie meurtrière, individuelle ou collective, ou encore de fanatisme religieux, mais on ne saurait s'attendre à ce qu'un homme ordinaire, ayant le libre choix de ses actions, le transgresse simplement par obéissance. Ainsi parle le sens commun.
Aussi assurée que cette prédiction puisse paraître, c'est pourtant l'hypothèse qu'entreprit de tester Stanley Milgram dans une série d'expériences qui impliqua prés d'un millier de sujets des deux sexes, appartenant à toutes les couches sociales (employés, professeurs de lycée, ingénieurs, infirmières, assistantes sociales, hommes d'affaires, cadres, etc.), répartis dans chaque expérience selon un pourcentage immuable fixé à l'avance.
Les sujets avaient été recrutés par une annonce passée dans le journal local, puis par courrier, sollicitant leur participation à une étude scientifique menée par