Tristan et iseut
Cette femme qui a partagé avec moi Aragon, Wyeth, Brel et tant d’autres. Cette femme qui m’a fait pleurer, jouir, rire et pleurer. Qui a fait de ma vie une vie. Cette femme me jette aujourd’hui à des minutes qui n’appartiennent plus qu’à moi. Des minutes de famine et d’insomnie, des minutes d’attente et de désespérance.
Comment ne pas lui en vouloir, comment ne pas avoir envie de la tuer, la rouer de coups, la trainer parterre par les cheveux. Moi qui n’ai fait que l’aimer.
Tout à l’heure, je lui ai arrachée quelques cheveux, en cachette. Ils sont dans ma poche. Cela me rassure ses petits brins soyeux et insolents que je caresse du bout des doigts.
Elle est morte ce matin. Nous sommes morts ce matin. Nous qui étions si vivants, si présents. Hier.
J’étais fatigué ce soir-là en sortant du boulot. Une fatigue profonde, lourde et ténue. Trop de travail, de pression, de retard. Mon seul remède : l’océan. Je décide d’aller me balader seul sur la plage. Prendre l’air, laisser le vent fouetter mon visage, gouter le sel sur mes lèvres. Ecouter, écouter, entendre ce grondement, ce tapis qui se déplie, va et vient, depuis des millénaires et pour toujours.
Au printemps, le couché du soleil sur la plage appartient aux retraités et aux chiens. C’est doux, calme et vigoureux.
Des rires ingénus me parviennent du haut des dunes. Des rires heureux, francs et libres. Attiré par cette voix qui me semble familière, je me dirige naturellement vers