L'art est-il moins nécessaire que la science?
Pourquoi se demander si l'art est moins nécessaire que la science ? Cette question présuppose l'existence de critères en vertu desquels on les évalue. Or ce point n'est pas évident. Chaque domaine a sa spécificité, il suppose une formation différente et ne vise pas les mêmes objectifs. Un artiste dévoile la beauté ou la laideur du réel, un savant cherche à l'expliquer sans prendre en compte des critères esthétiques. La comparaison s'établit donc en fonction d'un troisième domaine. Faut-il faire intervenir des valeurs socio-économiques comme l'utilité, la rentabilité ? Doit-on penser aux applications pratiques des sciences, à leur lien avec l'industrie ? Si cela est plausible, il reste encore à examiner si l'art mérite d'être jugé moins indispensable. Les critères au nom desquels on l'affirmerait lui sont-ils appropriés ?
1. Les raisons de la question
A. Le présupposé du sujet
Selon Aristote, l'adjectif « nécessaire » est d'abord synonyme de fatal ou d'inéluctable. Il désigne « ce qui ne peut pas ne pas être. » Mais Aristote indique aussi l'existence d'une autre définition. Est nécessaire ce qui est indispensable. Dans ce cas, il faut absolument acquérir ce moyen sous peine d'échouer. C'est ce sens qui est au cœur de notre sujet. Lorsque nous disons qu'une chose est moins nécessaire qu'une autre, nous sous-entendons l'existence d'objectifs à atteindre. C'est donc un jugement relatif à des circonstances déterminées et variables. Il est clair que l'on peut moins se passer d'un tournevis que d'un couteau s'il s'agit de démonter un meuble mais que l'inverse deviendra vrai si l'on cherche à découper une tarte. Cet exemple fait apparaître l'importance du critère de l'utilité.
Cette valeur permet-elle de juger la nécessité respective de l'art et de la science ? Il semble clair que, pris sous cet angle, la science doive être considérée comme plus indispensable que l'art. Son alliance avec la technique, qui donna naissance aux technologies, lui