L'oeil vivant sur corneille
Sur Corneille :
L’apparition de la présence suffit à convaincre absolument le héros, le paraître révèle l’être, resplendissant (d’où la fréquence du mot « «éclat », splendeur active de la présence). Ce thème existe déjà dans la poésie amoureuse de l’époque, et parcourt le mouvement baroque. Ce charme exercé peut détruire son sujet. Ambivalence des personnages cornéliens face à cet éblouissement, fascination irrésistible et honte/répugnance.
Ils exigeront donc des gages qui assurent l’authenticité de cet éclat, allier beauté et vérité. De plus l’effet de présence s’évanouit quand on en « détourne le regard », c’est pourquoi il faut lui donner la durée par un serment. Serment auquel on ne peut pas manquer sans encourir une honte suprême ; à l’inverse, si malgré les contraintes et les tentations, il parvient à « résister », il gagne du même coup l’admiration universelle. L’être ébloui devient glorieux et éblouissant, mérite l’être aimé.
Par ailleurs, l’ébloui doit aussi faire face aux rivalités, il n’est pas le seul à aimer la beauté. Il doit résister aux calomnies. Le héros doit passer outre les «illusions » dressées contre la beauté, et finit par accéder à une certitude supérieure. L’illusion chez Corneille n’est pas un obstacle métaphysique, fatal, mais un état momentané, surpassé par l’éclat, absolument vrai, de la beauté.
Les personnages de Corneille débattent pour savoir si l’on peut se fier au visage pour juger un homme ; les nobles, honnêtes s’y fient, ceux habitués aux fourberies sont méfiants. La sournoiserie est l’arme des faibles et des femmes.
Le héros cornélien est à la fois faible et fort, il souffre d’un amour, mais est trop fier pour s’y livrer ouvertement ; s’en rendre maître est leur devoir. L’idée de gloire contraint le héros à se dédoubler entre un « dehors » et un « dedans ». Cette dualité n’est pourtant pas celle de l’être vrai refoulé et du paraître faussé. Les personnages ont autant la passion de l’honneur