Analyse, orniere
Pur moment de créativité, Ornières (dont on notera le pluriel) vient développer une vision fraîche et mystérieuse. C’est un détour dans un univers modifié. Le poète transforme ce qu’il voit et nous en donne le résultat dans une instantanéité formidable quoique nuancée comme toute voyance rimbaldienne. Et n’est-ce pas là seulement, le sens de ces ornières, chemins de traverse ou paysages qui se surimpriment sur les paysages existants ? En effet, il serait trompeur de croire que la démarche du voyant n’est pas une démarche profondément énergique, qui a pour objet de dynamiser les éléments de la réalité, non pour créer des erreurs mais bien pour révéler une potentialité. C’est le cas avec ce carrousel. D’ailleurs, il était temps ! Lorsque le feuillet des Illuminations a été remis par Rimbaud à Verlaine, Ornières figurait bien en dessous de Ville. Et l’on voit, au moins symboliquement, la nécessité d’échapper à une ville occidentale ou une ville trop raisonnable, à creuser des ornières que le citoyen du texte précédent avait pris soin, comme ses concitoyens, de boucher. En ce sens, l’élément naturel qui prédomine dans Ornières est une bonne solution pour contrecarrer la désastreuse image de la Ville. Insistons enfin sur le pluriel de ces ornières qui indique,