Annie ernaux la femme gelée commentaire
Dans La Femme gelée, oeuvre largement autobiographique, la narratrice montre les limites de l’émancipation féminine dans les années 60, pour comprendre comme une femme peut se trouver « encarcanée », dépossédée d’elle-même et de toutes ses aspirations. Mariée à un étudiant en droit pourtant plein de théories idéales sur l’égalité des sexes, elle est vite happée par un conditionnement imposé par la société et voit sa vie confisquée par toutes les tâches ménagères qu’elle est finalement seule à accomplir. Le lecteur observe la jeune femme pleine d’enthousiasme et de curiosité pour les études et l’avenir, perdre peu à peu son élan, ses propres désirs de liberté et devenir comme tant d’autres une « femme gelée ».
Un mois, trois mois que nous sommes mariés, nous retournons à la fac, je donne des cours de latin. Le soir descend plus tôt, on travaille ensemble dans la grande salle. Comme nous sommes sérieux et fragiles, l’image attendrissante du jeune couplemoderno-intellectuel. Qui pourrait encore m’attendrir si je me laissais faire, si je ne voulais pas chercher comment on s’enlise,doucettement. En y consentant lâchement. D’accord je travaille La Bruyère ou Verlaine dans la même pièce que lui, à deux mètres l’un de l’autre. La cocotte-minute, cadeau de mariage si utile vous verrez, chantonne sur le gaz. Unis, pareils. Sonnerie stridente du compte-minutes, autre cadeau. Finie la ressemblance. L’un des deux se lève, arrête la flamme sous la cocotte, attend que la toupie folle ralentisse, ouvre la cocotte, passe le potage et revient à ses bouquins en se demandant où il en était resté. Moi. Elle avait démarré, la différence.
Par la dînette. Le restau universitaire fermait l’été. Midi et soir je suis seule devant les casseroles. Je ne savais pas plus que lui préparer un repas, juste les escalopes panées, la mousse au chocolat, de l’extra, pas du courant. Aucun passé d’aide-culinaire dans les jupes de maman ni l’un ni