Boule de suif
Boule de suif : l’existence problématique de la prostituée
Kazuhiko ADACHI
« Je travaille ferme à ma nouvelle sur les Rouennais et la guerre. Je serai désormais obligé d’avoir des pistolets dans mes poches pour traverser Rouen . » C’est la première mention adressée à Flaubert sur Boule de suif, premier chefd’œuvre de l’écrivain, qui lui ouvrit la porte du monde littéraire. Maupassant prenait connaissance du caractère satirique de son œuvre contre la guerre et la bourgeoisie régionale (en prenant exemple sur le maître). En effet, l’auteur dévoile « la laideur de l’Égoïsme humain » à travers le sacrifice de la prostituée contrainte de passer une nuit avec l’officier allemand. Quant à la guerre, donner « une note juste sur la guerre » et « dépouiller » son œuvre « du chauvinisme à la Déroulède [...] », c’est l’intention de l’écrivain. Flaubert, de son côté, répondit par des applaudissements à son « disciple » : « [...] je considère Boule de suif comme un chef-d’œuvre ! Oui ! jeune homme ! Ni plus, ni moins, cela est d’un maître. C’est bien original de conception, entièrement bien compris et d’un excellent style . » D’après lui, c’est la liaison étroite et heureuse entre l’idée et le style d’une œuvre qui lui assure de sa perfection . Ainsi semble-t-il pertinent de chercher le secret du chef-d’œuvre dans le style, et plus largement, dans la construction de Boule de suif. Comment l’écrivain réalise-t-il le dessein de satire dans son œuvre ? Boule de suif : prostituée regardée Maupassant compose les personnages de cette œuvre, dix voyageurs de la diligence, par un « condensé de la société », de sorte que chaque personnage représente une classe sociale : noblesse (le comte et la comtesse Hubert de Bréville), haute bourgeoisie (M. et Mme Carré-Lamadon), marchands (M. et
Lettre à G. Flaubert, le décembre , in Flaubert / Maupassant, Correspondance (abréviation : Corr.), texte établi par Y. Leclerc, Flammarion, , p. . er juillet , repris dans L. Forestier, Boule