Camus
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La technologie informatique nous permet, toutefois, de retrouver aisément la composition première de cette toile. Du premier plan à l’œuvre tendue (au fond), le peintre a distribué les différentes phases du processus artisanal de la tapisserie. Les historiens de l’art nous apprennent que ce travail minutieux doit être considéré à la fois pour lui-même et comme la métaphore de l’acte de peindre. Le tableau dévoile d’abord le processus du faire, lié à la légende de l’intrépide (et mortelle) Arachné, qui provoque Pallas, la déesse des Arts. Les deux femmes se disputent sur la question de savoir qui est la plus experte. Pallas l’emporte (évidemment), ce qui condamne Arachné au « ressassement » éternel d’un même tissage.
Les différents plans du tableau illustrent cet affrontement. Au plus près, Arachné (de dos) manipule un dévidoir, Pallas (de face) un rouet : toutes deux, apparemment, font montre de leur habileté. Plus loin, dans un second espace, Pallas casquée, de profil, rivalise avec Arachné, de face, qui défie la déesse, sous les yeux de trois courtisanes.
Ce second espace (au fond) a trait à la question du rendu des apparences, ce qui est le propre de la peinture chargée, ici, de traduire visuellement la fable. La scène est ambiguë : Arachné et Pallas semblent appartenir à la tapisserie tendue au fond, représentant Europe enlevée par Zeus. Cependant, l’ombre des deux rivales se projette sur le sol.
Ces deux moments du mythe forment un ensemble dont les fils doivent être renoués. Au premier plan, le faire, et au second, les modalités du voir, s’articulent en une même image par une multitude de correspondances qui renvoient à la création et à la contemplation. Arachné a le même mouvement descendant du bras dans les deux plans, Pallas un même mouvement ascendant. Près de nous, trois