Dissertation
La littérature tient une place essentielle, souvent inaperçue, quelle que soit la problématique qu’abordent les sciences humaines et sociales. La raison de « son extraordinaire pouvoir social », selon les termes de Marthe Robert, est double et empêche de la négliger dans un programme culturel et institutionnel. En effet, la littérature est le lieu par excellence des représentations que les êtres humains élaborent de leur existence en société. En ce sens, leurs œuvres sont des traces, non immédiatement décodables, des tensions, désirs et vécus de leurs réalités. Les banlieues font partie de ces réalités au même titre que les espaces plus nantis. Néanmoins les maîtres du jeu de la diffusion littéraire négligent trop souvent des œuvres et des imaginaires qui les éloignent par trop de leurs représentations et de leurs valeurs et − au mieux ou au pire….−, se contentent de leur donner un coup de flash médiatique1. Ces agitations épisodiques dans les médias participent au « débat national » sur les banlieues et à la « violence » à laquelle le mot renvoie et oublient alors l’aspect proprement littéraire. L’espace de la banlieue existe-t-il dans la littérature française et francophone ? Une telle question ne peut avoir qu’une réponse affirmative. Les auteurs, des plus prestigieux aux plus obscurs, y ont puisé depuis le XIXe siècle lorsque sous la poussée irréversible des centres urbains, ces « ceintures » ou « couronnes » ont encerclé les villes, faisant exister une population autre que citadine. Comme le rappelle Alain Rey :
« Jusqu’au XIXe siècle, la banlieue autour d’une grande ville est l’espace des maraîchers, qui nourrissent la grosse bête urbaine. Les misanthropes s’y réfugient, les riches y construisent des maisons de demi-campagne. Puis vient la révolution industrielle : la banlieue se peuple et s’identifie presque au faubourg, ce bourg du dehors (for, dans forboc, confondu avec faux). Faubourg et banlieue : même combat ; la « fausse »