Euthanasie
Dans son célèbre livre, Du progrès et de la promotion des savoirs (1605), le philosophe anglais du XVIIe siècle, Francis Bacon, réputé père du néologisme, en avait la vision suivante :
« [Les médecins] s’ils étaient jaloux de ne point manquer à leur devoir, ni par conséquent à l’humanité, et même d’apprendre leur art plus à fond, ils n’épargneraient aucun soin pour aider les agonisants à sortir de ce monde avec plus de douceur et de facilité ». Bacon entrevoit l’euthanasie comme une option tout à fait compatible avec la « dignité humaine » (quel concept formidablement malléable n’est-ce pas ?), voire même enrichit cette notion en l’actualisant. Pour le philosophe, dans les situations désespérées pour le malade, l’euthanasie est un devoir, un acte de compassion du médecin à l’égard du patient à une période où des possibilités comme l’application de soins palliatifs n’existaient pas encore.
Il n’est en rien étonnant que les propos baconiens d’alors puissent choquer le lecteur contemporain, car entre-temps c’est bien la vision même de l’euthanasie en société qui s’est ternie par l’histoire. Quelles interrogations peut-on tirer de ce fait sur le texte proposé au Sénat relatif à l’euthanasie (ou sa version novlangue 2011 qui passe quand même bien mieux, « l’aide médicalisée pour mourir ») ?
Problème n°1 : Tandis qu’en société française le suicide est dépénalisé, de quel droit le refuser à une personne n’ayant les moyens de le faire ? Après tout, si un citoyen français libre de ses choix, à partir du moment où ils ne portent préjudice direct à autrui, se retrouve atteint d’une maladie incurable et en proie à d’extrêmes souffrances autant physiques que morales, revendique son droit à