Francais poesies analyses
Extrait : Aujourd’hui, 15 juin 2000, de seize à dix-sept heures, j’ai donné mon dernier cours. De la semaine. Du trimestre. De l’année scolaire. … De ma vie. Ultime cours avant la retraite. Finalement moins difficile que je ne le craignais. C’est le dernier mais on ne s’en aperçoit pas. J’ai pris le marqueur et j’ai écrit au tableau blanc :
On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans Et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade. Arthur Rimbaud.
Puis, j’ai annoncé à la classe de seconde BEP : - Écrivez les réflexions que cette citation vous inspire. Devant moi, vingt-huit visages — seize-dix-huit ans — se sont décomposés. Soupirs contestataires. - Le jour de la sortie, M’dame, vous allez pas nous faire galérer ! - Quand on a dix-sept ans, M’dame, on a envie d’être dehors, pas enfermé dans un lycée. Il fait beau, j’ai envie de respirer l’air de ma mob, moi, pas vos tilleuls verts sur la promenade. Cri spontané d’Abed, désespéré de devoir travailler. Je me suis empêchée de sourire. J’ai souri quand même. Mon contact avec les élèves a toujours été bon. Leurs dix-sept ans justement, leur insouciance parfois m’amusent, et parfois me fascinent aussi. J’ai préféré garder le silence sur mon départ. À quoi bon leur apprendre qu’ils sont mes derniers élèves. Seule, au milieu d’eux, je sais. Et ce secret, léger, au fond ne me déplaît pas. Tellement moins destructeur que celui qui squatte mon cœur depuis… depuis si longtemps. Trop longtemps. Ils ne savaient qu’inventer pour retarder l’instant de travailler. - Hé, Madame, votre phrase là, c’est pas du français, de la philo plutôt. - Et vous, vous vous en souvenez de vos dix-sept ans ? Djamal, au fond de la classe, a balancé sa question. Pas vraiment insolent. Juste un peu provocateur. D’une voix maîtrisée — j’ai appris à cacher mes émotions — j’ai laissé