Haiti
S'il y a tellement de gens massés dans Port-au-Prince et ces bidonvilles qui leur sont tombés sur la tête, c'est que la population a massivement quitté des campagnes et des régions forestières qui ne peuvent plus leur fournir nourriture, vêtements et gîte sécuritaire.
Les forêts d'Haïti couvraient autrefois 80 % de l'île. Il en reste aujourd'hui entre 1 % et 2 %. Leur disparition s'est accélérée récemment, car ces forêts couvraient encore 20 % du territoire haïtien en 1960.
La pauvreté endémique a fait le reste. Aujourd'hui, faute de revenus suffisants pour s'acheter du gaz ou de l'électricité pour la cuisson et l'éclairage, les Haïtiens utilisent le charbon de bois pour 72 % de leurs besoins en énergie. On obtient ce charbon en coupant ce qui reste de forêts et en préparant ce combustible en le carbonisant dans un four pauvre en oxygène, ce qui l'assèche et concentre son carbone pour une combustion ultérieure. L'absence d'une politique de conservation et d'un programme de déploiement de solutions plus écologiques explique que rien ne freine cette dévastation.
Lors de la conférence de Montréal sur les changements climatiques en 2005, j'ai eu la possibilité d'interviewer l'ex-président Aristide. Je n'ai jamais publié cette entrevue, car j'ai craint qu'on pense que j'aie voulu me moquer de lui, ou ridiculiser à travers lui un État qui n'en portait souvent que le nom. À la question de savoir pourquoi l'aide internationale fournie à ce pays ne s'était pas encore soldé par la mise en place d'un important programme de reboisement, le président haïtien d'alors m'avait répondu cette ineptie monumentale: on le fera, m'avait-il dit en substance,