Wajdi Mouawad, Incendies, 2003 – Scène 5 – Ce qui est là
Wajdi Mouawad est un dramaturge contemporain d'origine libanaise qui travaille entre le Québec et la France.
Incendies s’ouvre sur la mort de Nawal. Ses jumeaux, Jeanne et Simon, découvrent qu’ils ont un frère et un père qu’ils ne connaissent pas, et qu’ils doivent retrouver. La pièce alterne des scènes du présent et des scènes du passé, qui racontent la jeunesse de Nawal. Dans cet extrait, Nawal annonce à son petit ami qu’elle est enceinte …afficher plus de contenu…

Je vais me taire. Ne dis rien. Ne dis rien.
Elle se tait.
- C’est Nawal qui ouvre la scène par une longue tirade. La première apostrophe à Wahab est très forte, comme le montre l’exclamative : on voit l’importance de ce qu’elle va lui dire. L’impératif « Ecoute-moi » le confirme : elle a un aveu à lui faire.
- Cet aveu semble difficile. Elle poursuit par une accumulation de verbes de parole niés, à l’impératif. Les négations cumulées créent une forte insistance sur le silence souhaité de Wahab, insistance renforcée par l’hyperbole finale « un mot, un seul » / « pourrais me tuer ». L’instant semble dramatique, et le …afficher plus de contenu…

 Ce premier mouvement de la tirade crée un véritable suspense chez le spectateur : l’aveu est annoncé, puis interrompu, il est heureux mais malheureux, lyrique mais tragique… On ne sait pas à quoi s’attendre.
C. Deuxième partie de la réplique de Nawal : la tentative de se remettre à parler malgré tout
Je t’ai appelé toute la nuit. J’ai couru toute la nuit. Je savais que j’allais te trouver au rocher aux arbres blancs. Je voulais le hurler pour que tout le village l’entende, pour que les arbres l’entendent, que la nuit l’entende, pour que la lune et les étoiles l’entendent. Mais je ne pouvais pas. Je dois te le dire à l’oreille, Wahab, après, je ne pourrai plus