La conscience morale est-elle une illusion ?
Débattre sur la conscience morale nécessite avant tout d'évoquer un phénomène relativement dont nous avons tous fait l'expérience : celui d'une petite voix qui joue le rôle d'interlocuteur intérieur, et qui se manifeste parfois pour nous sommer de faire quelque chose ou au contraire de s'abstenir de le faire. Suivant un phénomène de dédoublement, cette petite voix nous permet de distinguer le bien et le mal, d'en fixer des normes et ainsi de juger la moralité de nos actions ou de celles d'autrui (on remarque d'ailleurs un premier paradoxe : est-il moral de juger la conduite d'autrui, même si celle-ci est profondément immorale?). Mais qu'est-ce que la morale? Celle-ci (du latin mores coutumes, moeurs) se définit comme une théorie de l'obligation, de la loi et du devoir, au contraire de l'éthique (du grec ta ethè, moeurs) qui est la recherche d'un système de pensées visant une existence bonne et heureuse. La morale, discipline des normes, est donc déontologique (elle fixe des devoirs) ; c'est pourquoi on peut parler d'impératifs moraux. Se demander si la conscience morale est une illusion revient alors à déterminer si la conscience morale est inhérente à la race humaine. La « petite voix » qui constitue la conscience morale est-elle présente universellement, dans tous les hommes, de manière innée? Nos impératifs moraux sont-ils inscrits au cœur de la conscience, indépendamment de toute acquisition, ou sont-ils au contraire l'objet d'une assimilation? A t-on simplement l'illusion d'une conscience morale intrinsèque, puisque cette assimilation s'opère peut-être paradoxalement de manière inconsciente : une fois achevée, les impératifs moraux en question sembleraient alors naturels et spontanés. Pour tenter d'apporter une réponse à ce problème philosophique particulièrement épineux, nous montrerons tout d'abord que la conscience morale peut-être considérée comme universelle et instinctive (il