Le dieu mort ne (m. lilla)
La tradition politique moderne qui est la nôtre s’enracine dans une philosophie radicalement opposée à la « théologie politique ». Cette dernière pense les questions politiques en fonction de l’autorité de Dieu et non en termes purement humains. La théologie politique nous paraît incompréhensible aujourd’hui et dénuée de tout intérêt. Pourtant, une théologie politique moderne a été formulée par plusieurs auteurs passés inaperçus, au début du XXe siècle. Un retour de la théologie politique ne peut donc être exclu. Il faut même reconnaître que la sécularisation du politique n’est nullement évidente, en faisant figure d’exception au cours de l’histoire humaine. Afin de la conserver, il est nécessaire de la comprendre pleinement, ce qui ne peut se faire qu’en rétablissant le dialogue avec l’autre grande tradition politique, la théologie politique.
PREMIÈRE PARTIE
On observe que dans toute société, l’homme s’est fait une idée du nexus divin, c’est-à-dire des rapports existant entre Dieu, l’homme et le monde. La théologie politique naît précisément lorsque l’on tente de penser la politique à partir du nexus divin, ce qui est historiquement ce qui s’est produit dans la totalité des sociétés humaines – à l’exception notable de l’Occident moderne.
A. Trois théologies politiques pour trois images de Dieu
L’homme s’est fait trois idées distinctes de la puissance divine, qu’il est possible de mettre en relation avec une théologie politique particulière.
La première théologie est celle du panthéisme, attachée à l’image d’un Dieu immanent, habitant le monde aux côtés des hommes. La puissance divine fait tomber la pluie, nourrit les récoltes ou propage des maladies. C’est une force avec laquelle il faut composer, afin de protéger et développer la nation.
La seconde théologie est liée au gnosticisme, pensant Dieu comme une puissance lointaine, distante sinon coupée du monde. La création a été abandonnée aux mains de forces