Le fis du pauvre
Fouroulou, son frère et ses sœurs grandissent comme ils peuvent. Mais, somme toute, ils passent ainsi une période paisible dont Fouroulou ne garde qu’un vague souvenir. Il ne se rappelle avec précision que les mauvais moments de son enfance. Il avait onze ans environ lorsque son père exténué par la fatigue tomba gravement malade. C’était la fin de la saison des figues. Ramdane avait passé auparavant toutes les nuits au champ, surveillant le séchoir. Un matin, il remonte à la maison les yeux enfoncés dans leurs orbites, le corps brûlant, les lèvres blanches. Il s’affaisse en gémissant sur le sac de feuilles de frêne qu’il a rapporté péniblement sur son dos. Vite, une natte une couverture, un oreiller tout rond et aplati. Il se couche et refuse de manger. Il gémit toujours. Sa femme croit que ça passera; les filles se demandent s’il faut pleurer. Fouroulou est impassible du moment que ça ne le concerne pas. D’ailleurs son père est fort. Il peut supporter la maladie. - Les bœufs n’auront rien pour la nuit, le sais-tu? dit la mère. Alors, tu ne peux vraiment pas remplir un sac ce soir? - Non, je suis malade. Va au champ avec tes enfants. - Montez sur le frêne du milieu, le plus doux de tous, le plus facile aussi. Je voulais le réserver pour les dernières bouchées. Puisqu’il en est ainsi, allez-y. Ne laisse pas monter Fouroulou. Il fera boire les bœufs. Je voudrais dormir. Qu’ils aillent jouer dehors. Le soir, la mère revient. Elle le harcèle. - Ça ne va pas mieux? En t’aidant d’un bâton, tu pourrais peut-être
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L’année même où il perdit ses tantes, alors qu’ils souhaitaient tous un peu de bonheur, Fouroulou eut un frère, qu’on appela Dadar, et dont la venue réveilla la rage impuissante de Helima. Fouroulou en perdant son titre de fils unique prit celui d’aîné qui comporte, lui expliqua-t-on, certains devoirs pour l’avenir, quand le petit sera grand, et beaucoup d’avantages dans le présent. Pour commencer, il eut sa part de