Le travail est-il une fatalité ?
Introduction :
Parler d'une fatalité éventuelle du travail, c'est d'abord interroger le sens du travail pour l'homme. Que l'homme travaille est un fait indéniable. Par contre, le sens de cette activité sociale de production et d'échange ne va aucunement de soi. Plus encore, le fait que l'homme travaille le plus souvent par contrainte semble conforter l'hypothèse d'une fatalité du travail. Par fatalité, l'on désigne communément ce qui doit arriver, ce qui ne peut qu'arriver, que nous le voulions ou non. L'idée de fatalité s'identifie ainsi à celle de destinée dans le contexte religieux antique (voir l'idée du « fatum »). Dans le contexte économique et social du travail, la fatalité semble plutôt devoir être comprise comme une obligation, celle qui nous impose d'être socialement utiles et productifs. Pourtant, affirmer que le travail, en soi, constituerait une obligation en quelque sorte « fatale » ne peut revient-il pas à le réduire à ce qu'il n'est pas essentiellement ? En effet, ce même travail peut tout aussi bien devenir le principe d'une libération de l'homme, à l'image de celle thématisée par Hegel dans sa dialectique de la maîtrise et de la servitude. Par suite, le sens de ce que travailler veut dire ne saurait être univoque. Le concept et la valeur du travail ont assurément plusieurs sens irréductibles à la seule fatalité et au pessimisme radical qui l'accompagne.
1 – Le travail définit, en premier lieu, une obligation sociale qui n'a rien, à proprement parler, de fatal, même si les conditions de mise en œuvre de cette activité peuvent s'avérer punitives.
Ce qui distingue le travail de toute autre activité animale est d'abord son origine spécifiquement sociale, origine irréductible à tout déterminisme biologique instinctif. Originairement, nous n'avons pas travaillé naturellement mais plutôt culturellement. A ce titre, le travail ne fut pas initialement une fatalité naturelle mais une obligation sociale, ce qui