Lecture analytique sur ponge
Texte :
Dans Le parti pris des choses (1942), Ponge décrit des choses », des objets banals, quotidiens et, dans La Rage de l'expression (1952), il explique sa démarche : faire évoluer la poésie et le lecteur. En préambule au poème « L'œillet », il présente sa méthode, avant de proposer en application, quinze études évoquant cette fleur.
L'œillet
Relever le défi des choses au langage. Par exemple ces œillets défient le langage. Je n'aurai de cesse avant d'avoir assemblé quelques mots à la lecture ou l'audition desquels l'on doive s'écrier nécessairement : c'est de quelque chose comme un œillet qu'il s'agir. Est-ce là poésie ? Je n'en sais rien, et peu importe. Pour moi c'est un besoin, un engagement, une colère, une affaire d'amour-propre et voilà tout.
Je ne me prétends pas poète. Je crois ma vision fort commune. Étant donnée une chose - la plus ordinaire soit-elle - il me semble qu'elle présente toujours quelques qualités vraiment particu- lières sur lesquelles, si elles étaient clairement et simplement exprimées, il y aurait opinion unanime et constante : ce sont celles que je cherche à dégager. Quel intérêt à les dégager ? Faire gagner à l'esprit humain ces qualités, dont il est capable et que seule sa routine l'empêche de s'appro- prier. Quelles disciplines sont nécessaires au succès de cette entreprise ? Celles de l'esprit scienti- fique sans doute, mais surtout beaucoup d'art. Et c'est pourquoi je pense qu'un jour une telle recherche pourra aussi