Perrenoud
Pouvoir et travail en équipe
Philippe Perrenoud
Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation
Université de Genève
1996
Il est impossible de travailler ensemble sans être confronté au pouvoir. C’est évident, dira-t-on, lorsque les personnes qui collaborent sont dans un rapport établi d’autorité. Mais entre égaux, dont aucun n’exerce d’autorité formelle sur les autres ?
Examinons rapidement ces deux situations, pour montrer qu’il n’y a pas autant de différence qu’on croit. Puis venons-en à l’essentiel : pourquoi n’y a-t-il jamais de collaboration sans phénomène de pouvoir ? Arrêtons-nous ensuite aux diverses formes de coopération et de travail d’équipe, et aux implications en termes de pouvoir. Examinons enfin quelles sont les représentations du pouvoir, les tabous qui entourent cette notion et la formation qui pourrait aider à les lever aussi bien qu’à vivre le pouvoir dans une certaine sérénité.
Ce qui amène à une structuration du propos en cinq parties principales
I. Le pouvoir dans une relation d’autorité.
II. Le pouvoir hors des relations d’autorité.
III. La raison du plus raisonnable et ses limites.
IV. Il y a travail d’équipe et travail d’équipe : enjeux dans les organisations.
V. Exorciser le pouvoir ?
Revenons sur chacun de ces points.
I. Le pouvoir dans une relation d’autorité
Comme le rappelle Foucault (1987), le pouvoir n’est pas la propriété d’un acteur, mais une relation ou un réseau de relations. Friedberg le dit plus clairement encore :
Dans tout champ d’action, le pouvoir peut se définir comme l’échange déséquilibré de possibilités d’action, c’est-à-dire de comportements entre un ensemble d’acteurs individuels et/ou collectifs. Une telle définition (…) a au moins trois implications importantes.
En premier lieu, elle met l’accent sur la nature relationnelle et non transitive du pouvoir. Le pouvoir