Visions amoureuse honore de balzac
894 mots
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Les répliques, en elles-mêmes tendues, donnent aussi de la vigueur à cet affrontement. Les deux interlocuteurs semblent observer la bienséance et respecter les convenances de la vie mondaine avec des échanges généreux en formules de politesse et en expressions précieuses, propres au badinage amoureux. Certes Montriveau, à son arrivée, se montre familier en tutoyant la duchesse ("Si tu disais vrai hier, sois à moi, ma chère Antoinette", ligne 1), mais, très vite, la réserve semble reprendre le dessus et les deux interlocuteurs recourent au vouvoiement, garant de distances. Les formules de politesse foisonnent dans cet extrait : "je vous prie" (ligne 5), "vous me permettrez" (ligne 10), "je vous prierais" (ligne 13), "vous me feriez bien plaisir de" (ligne 31), "Je suis enchanté" (ligne 33), "Me permettez-vous" (ligne 34), "Je vous rends mille grâces" (ligne 36). Mais, ces formules polies, dont l'avant-dernière est en fait une question rhétorique, prennent une nuance ironique dans leur bouche, témoignant de l'échange tendu qu'ils se livrent, implicitement polémique, substitut d'une violence physique contenue.
Du reste, l'observation attentive décèle la violence latente de cet échange par la modalité et le rythme des phrases, les modes verbaux et la nature grammaticale des mots :
- les exclamations jalonnent la conversation. La duchesse répète à la forme exclamative le "je veux" (ligne 6) de Montriveau et marque ainsi son indignation. Plus loin, elle répète à trois reprises l'interjection "Ah !" (lignes 9, 12 et 31) qui introduit ses répliques et marque son émotion.
- encore plus fréquentes, les interrogations animent les répliques et lui donnent sa vivacité. Elles sont parfois rhétoriques ("Puis, que signifie votre je veux ?", ligne 6), parfois provocatrices ("Vous l'aurez ?", ligne 28), parfois menaçantes ("Et si, ... je l'exigeais ?", ligne 11), parfois enfin elles marquent la surprise (ligne 28) ou la confirmation ("Vous ne me céderiez rien sur ce point ?",