Baudelaire_parfum_exotique_mallarme_brise_marine
(Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857)
Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud [d'automne,
Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,
Je vois se dérouler des rivages heureux
Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone;
Une île paresseuse où la nature donne
Des arbres singuliers et des fruits savoureux;
Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,
Et des femmes dont l'oeil par sa franchise étonne.
Guidé par ton odeur vers de charmants climats,
Je vois un port rempli de voiles et de mâts
Encor tout fatigués par la vague marine,
Pendant que le parfum des verts tamariniers,
Qui circule dans l'air et m'enfle la narine,
Se mêle dans mon âme au chant des mariniers.
Perfume exótico
Quando, cerrando os olhos, numa noite ardente,
Respiro a fundo o odor dos teus seios fogosos,
Vejo abrirem-se ao longe litorais radiosos
Tingidos por um sol monótono e dolente.
Uma ilha preguiçosa que nos traz à mente
Estranhas árvores e frutos saborosos;
Homens de corpos nus, esguios, vigorosos,
Mulheres cujo olhar faísca à nossa frente.
Guiado por teu perfume a tais paisagens belas,
Vejo um porto a ondular de mastros e de velas
Talvez exaustos de afrontar os vagalhões,
Enquanto o verde aroma dos tamarineiros,
Que à beira-mar circula e inunda-me os pulmões,
Confunde-se em minha alma à voz dos marinheiros.
Brise marine
(Mallarmé, 1865)
La chair est triste, hélas! et j´ai lu tous les livres.
Fuir! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont [ ivres
D´être parmi l´écume inconnue et les cieux!
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe
O nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l´ancre pour une exotique nature!
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l´adieu suprême des mouchoirs!
Et, peut-être,