Candide
Dans cette argumentation indirecte, le rôle de l’implicite est souvent essentiel. L’apologue suggère souvent plus qu’il n’affirme une idée. Il recourt à la légèreté de l’allusion au détriment de la lourdeur de la démonstration. Il se cache de la censure en attribuant ses critiques à un tiers ou en les dissimulant dans des propos codés ou ironiques comme Voltaire.
Le grand mérite de cette forme d’argumentation est d’aiguiser la curiosité du lecteur, dont la complicité est requise pour deviner les intentions de l’auteur. « Les meilleurs livres sont ceux qui font faire la moitié du chemin au lecteur » ou « Le moyen d’ennuyer est de vouloir tout dire » a prévenu Voltaire.
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4.2.1 L’apologue ou la fable
L’apologue (du grec apologos, « récit ») est un court récit en prose ou en vers, dont on tire une instruction morale, c’est donc au sens strict un synonyme de « fable ». Plus généralement, il désigne un récit pédagogique à des fins morales, mais parfois aussi politiques ou religieuses. La fable a aussi le sens de fiction mensongère, c’est pourquoi Voltaire dans l’Ingénu pouvait s’exclamer : « Ah ! s’il nous faut des fables, que ces fables soient du moins l’emblème de la vérité ! J’aime les fables des philosophes, je ris de celles des enfants, et je hais celles des imposteurs. »
Le récit d’une anecdote mettant en scène des animaux, ou parfois des végétaux, à caractère anthropomorphique, a toujours servi à illustrer des leçons de sagesse pratique. Le genre provient de deux grandes traditions : l’occidentale représentée par les fables grecques attribuées à Ésope, et par Phèdre à Rome ; l’orientale qui prend racine dans le Pañchatantra sanskrit et qui nous est parvenue par Bidpaï en Inde et le livre de Kalila et Dimna en Perse et dans les pays arabes.