Commentaire charles cros "plainte"
Introduction
Le poète, et plus encore le poète amoureux, se console dans l’écriture, sorte d’exutoire de ses désillusions sentimentales. Ainsi, Charles Cros, dont la vie fut une suite de malchances, fait de ses poèmes les confidents de ses amertumes et de ses déceptions, en particulier dans Le Coffret de santal, œuvre qui préfigure le symbolisme et le surréalisme et recueil saisissant par la diversité de ses formes et de ses tons. Parmi les sonnets, le poème régulier « Plainte » est composé de quatre quatrains d’alexandrins, forme habituelle dans la deuxième moitié du 19ème siècle. Adressé à une citadine « fière », c’est une invitation vaine à abandonner le tumulte de la ville et à céder à un amour plus naturel.
Pour mieux convaincre son interlocutrice, l’auteur oppose systématiquement et explicitement deux tableaux, celui de la ville et celui du cadre naturel solitaire de la campagne, malheureusement incompatibles. Mais il y rend aussi compte de sa solitude et de son amertume, sans céder pour autant au pathétique, faisant même preuve d’un certain humour, lui pour qui la ville est à l’opposé de sa conception personnelle du bonheur.
Dans un premier temps, j’évoquerai la présentation par l’auteur de deux mondes incompatibles. Je montrerai ensuite que ce texte traduit la désillusion et la solitude du poète.
Deux mondes opposés
De la régularité et de l’équilibre de ce poème en alexandrins, se dégagent l’opposition de deux styles de vie, le contraste entre deux mondes opposés irréconciliables : la ville, que le poète veut fuir mais où se plaît la citadine parisienne (vers 3 et 4) à laquelle il s’adresse, et la campagne naturelle dont le calme l’attire (vers 5