Des choses aux mots : en quoi le traitement de l’objet reflète-t-il la personnalité artistique du poète ?
Des choses aux mots : en quoi le traitement de l’objet reflète-t-il la personnalité artistique du poète ?
Introduction
En 1857, Charles Baudelaire publie Les Fleurs du mal. Le titre de la 1ère section de ce recueil, « Spleen et idéal », illustre la dichotomie qui déchire le poète, partagé entre ses élans vers un idéal perdu et la tentation du spleen. Dans « Une charogne », le lecteur est amené à réfléchir à une nouvelle conception de la poésie seule capable d’arracher les êtres aux contingences de la condition humaine.
Ce poème contribua fortement au succès des Fleurs du Mal, à tel point que Baudelaire a pu même s'en plaindre comme il le dit dans une lettre de 1859 adressé à Nadar : « Il m'est pénible de passer pour le
Prince des charognes ». Le public a surtout été sensible à l'aspect provocant du sujet traité par le poète et à son aspect parodique au point que Sainte-Beuve a considéré dans l'une de ses lettres adressée à Baudelaire qu'il avait « pétraquis(é) sur l'horrible » (expression formée à partir du nom du poète italien de la
Renaissance, Pétrarque). C'est plus tard, à la fin du siècle, que l'on a commencé à voir dans ce poème une glorification de l'acte poétique et une allégorie du travail poétique. On a même pu faire de ce poème une mise en œuvre parfaite de la poétique moderne des Fleurs du mal, qui, comme le titre du recueil l'exprime, vise à «extraire la beauté du Mal », pour reprendre l'expression du poète dans l'un de ses projets de préface.
Le poème se présente comme une sorte de discours que le poète adresse à la femme qu’il aime. Baudelaire y reprend, d’une certaine manière, le carpe diem d’Horace et certains propos du poète de la Pléiade
Ronsard, notamment dans le sonnet « Quand vous serez bien vieille... ». Toutefois, le thème du temps qui détruit les êtres tandis que l’art peut préserver éternellement la beauté des formes se voit profondément