Dissertation : la misologie ou haine de la raison
L'homme est un animal doué de raison, comme l'affirme Aristote. Partant de ce constat, on imagine difficilement comment certains haïssent cette dernière, sans se rejeter eux-mêmes. Cette haine de la raison, la misologie, semble de prime abord une conséquence fortuite, non souhaitée par l'individu. Mais on découvre en s'y intéressant que la misologie est voulue, choisie par certains individus, en réaction au rationalisme à l'excès : ils tombent dans l'excès inverse ; l'exclusion de toute raison. Ils remettent ainsi en cause la raison comme raison-d'être de l'homme, pour la montrer du doigt en l'assimilant à ce qui le corrompt. Le sens commun devient la puissance capable de tout résoudre, ainsi que le décrit Kant : la misologie, « c'est affirmer qu'on peut plus facilement déterminer la taille et la distance de la Lune par la vue que par le calcul. » Est-il fondé de critiquer la raison jusqu'à la haïr et la bannir ? Nous répondrons à cette interrogation en explorant tout d'abord les limites de la raison, puis nous envisagerons la haine de la raison comme un malentendu fortuit. Pour finir, nous aborderons la misologie comme un choix conscient.
La raison a ses limites, que plusieurs philosophes ont tentés de souligner, à diverses époques. David Hume par exemple écrivit qu' « il n'est pas contraire à la raison de préférer la destruction du monde à l'égratignure de [son] doigt. ». Il révèle ainsi que la raison, contrairement à ce que les philosophes moralistes enseignaient, n'est pas toute puissante et qu'elle n'a pas le pouvoir sur nos passions. Le même Hume nous enseigne que la démonstration rationnelle n'est pas universelle, par exemple le postulat que le soleil se lèvera demain matin n'est pas démontrable, ce n'est qu'un savoir issu de l'expérience. De la même façon, Bergson restreint le champ de la raison en expliquant qu'elle est incapable de rendre compte de notre perception du temps, c'est à dire de ce qu'il nomme la durée, qui est