Dissertation sur le théâtre: pour être lu ou vu?
“L’une des caractéristiques les plus étonnantes du texte théâtral, la moins visible mais peut-être la plus importante, c’est son caractère incomplet. […]. Ce sera le travail du metteur en scène de donner les réponses. » (Anne Ubersfeld, 1980).
Le nom « théâtre » provient du mot grec theatron qui signifie « lieu où l’on voit ». Au fil du temps, cet art de la représentation a sans aucun doute connu de nombreuses variations dans sa mise en scène tout en conservant pourtant ses composantes principales, le texte théâtral en étant une essentielle. On peut alors se demander si ce texte, si spécifique, se suffit à lui-même. Anne Ubersfeld, auteur du livre Lire le théâtre nous répond que non, il n’est pas autosuffisant, il est même «incomplet ». Pourquoi pense-t-elle cela? Que pourrait-on objecter à cette thèse ? Quelle est la valeur du texte théâtral dans cet art qui a été défini comme un art « total » ? Anne Ubersfeld précise dans son ouvrage que le texte théâtral est incomplet, qu’il ne peut donc pas constituer en lui-même l’art théâtral dans son ensemble. Certes, c’est un texte écrit mais il est écrit pour être dit et joué par les acteurs dont le rôle devient alors fondamental pour le sens profond de la pièce. Ce sont eux qui restituent l’impression du langage parlé dans la vie réelle, le ton, l’intention, le volume de la voix, etc., qui font vivre le texte qui resterait donc mort sans eux. Ces facteurs déterminent la compréhension de l’œuvre pour le public qui assiste à la représentation, alors qu’elle reste personnelle et propre au lecteur du simple texte théâtral qui lui, doit imaginer- à partir des didascalies, quand il y en a - cette restitution du réel. Ces didascalies ont, en effet, été inventées tardivement dans l’évolution du théâtre. Ainsi au XVIIème siècle, où Molière bouleverse le théâtre en déclarant qu’il « n’est fait que pour être vu », elles étaient totalement absentes du