Doit-on apprendre à devenir soi-même?
Pourquoi, car on sait déjà bien assez qui on est. Cependant, on est très amplement inachevé, « en devenir », de sorte qu'il faut se compléter en évitant de se tromper. Il faudrait donc apprendre qui on est pour le devenir de mieux en mieux. Mais comment ? Avant toute chose, il faut donc revenir sur l'énoncé. Soi est le terme par lequel se forme l'identité du sujet. Mais cela s'effectue au travers de l'opération de réflexion : je suis le sujet (Descartes) et non pas une chose, je ne peux pas demeurer totalement statique d'autant que réfléchissant, j'ai de la mémoire et donc conscience du temps. Me voilà donc pris dans un paradoxe. D'une part, je dois tenir à moi et me renforcer dans cette situation, mais d'autre part, cette identité est dynamique et doit aussi changer. Il me faut donc me modifier sans pour autant me trahir : être davantage soi-même. En tout cas, nous sommes dans le devenir, nous sommes devenir. Le fleuve du temps nous entoure, nous entraîne dans la cascade d'une existence vouée à l'accident, à l'imprévu comme à la contrariété. Dans la vie, les choses ne se passent jamais comme prévu. Dès lors l'ambition de conduire sa vie paraît vaine, sinon chimérique. C'est parce que le courant nous entraîne, qu'il serait souhaitable de tenter d'aller là où on croit bon d'aller. Mais cela paraît au-dessus de nos forces. C'est ici qu'il faut introduire la notion de devoir. On opposera nettement la nécessité naturelle à l'obligation normative, sociale et ici rigoureusement morale. Le devoir est épreuve, c'est justement parce que c'est difficile et dangereux qu'il faut risquer avec énergie afin d'avoir au moins sa conscience pour soi. Si nous avons des devoirs envers les autres,c'est que nous en avons d'abord à l'égard de nous même ; le premier d'entre eux étant de conduire sa vie. Mais comment ? Il nous reste la ressource du dernier verbe : apprendre. Apprendre la géométrie, affaire de théorie. Apprendre à conduire : il faut