Ethique et politique
Hobbes Thomas
L'éthique et la politique chez Hobbes
Harald Höffding
Hobbes fonde sa conception tout entière de la vie éthique et sociale sur l'instinct de conservation personnelle avec la même énergie qu'il appuie sa conception tout entière de l'existence sur les lois du mouvement mécanique. Peut-être demandera-ton quel rapport il y a entre l'éthique et la politique de Hobbes d'une part et le reste de son système d'autre part; or il a déjà fait lui-même cette concession, qu'il y a deux voies qui permettent d'aboutir à l'éthique et à la politique, les déductions tirées de la science des corps, et l'expérience psychologique immédiate. Mais il ne s'est pas engagé du tout sur la voie déductive; cela tient à ce que ses écrits éthico-politiques ont été composés avant ses écrits de philosophie naturelle. Il n'essaie pas de faire dériver l'instinct de conservation de la mécanique; il ne voit pas dans la conservation de soi la tendance générale de tout ce qui existe, comme avant lui Telesio et Bruno, et après lui Spinoza. Il se contente de l'établir comme fait positif. Il y a cependant une troisième voie qui d'après Hobbes permet d'aborder l'éthique et la politique: la définition arbitraire, l'établissement arbitraire des premiers principes. En éthique et en politique nous avons affaire à notre propre vie; son estimation et son ordonnance dépendent de notre volonté. Voilà pourquoi l'éthique et la politique peuvent, d'après Hobbes, être des sciences constructives au même titre que la géométrie et la mécanique. Toutes les lois morales et politiques supposent en effet un contrat passé volontairement entre les hommes et qui a pour but de rendre une vie sociale — possible à de certaines conditions. De ce contrat on peut déduire les différentes règles morales et politiques. Mais, comme pour les hypothèses scientifiques générales, ici encore il importe essentiellement pour établir les principes de tenir compte de l'expérience; la volonté n'est nullement