La jurisprudence du Conseil d'Etat et le droit au recours du détenu
Les tribunaux administratifs se sont longtemps déclarés incompétents pour intervenir dans les questions carcérales, y laissant le champ libre à l’arbitraire des mesures disciplinaires au prétexte de la garantie de l’ordre intérieur de longues années durant. Cependant, les évolutions du droit européen dans le sens d’une meilleure protection des droits de l’homme, ont poussé à une modification de cette conception en incitant les juges administratifs à étendre leur contrôle de légalité aux domaines relevant de l’administration pénitentiaire. Ainsi, ces dernières années ont elles vu une succession de changements, certes tardifs, mais fort encourageants dans le sens du détenu, élargissant à chaque fois ses possibilités de recours à des mesures de l’administration ou des sanctions à son encontre par le biais des tribunaux administratifs français. Nous évoquerons ici le cas particulier de la jurisprudence du Conseil d’Etat, dorénavant à même de régler les conflits ayant trait au fonctionnement administratif du service pénitentiaire et en particulier de contrôler la légalité des circulaires et des décrets qu’il émet, de même que de revenir sur les décisions de la cour administrative d’appel saisie par les détenus n’ayant pas obtenu justice devant le tribunal administratif.
Cependant, nous nous interrogerons pour savoir en quoi l’évolution jurisprudentielle qu’a connue le Conseil d’Etat en matière de droit pénitentiaire et qui a permis l’apparition et l’ancrage d’un droit du détenu jusqu’alors absent, est-elle encore lacunaire ?
Nous verrons dans une première partie que ce droit au recours n’a été règlementé que tardivement et partiellement par le Conseil d’Etat mais que la dynamique instituée par les juridictions européennes est encourageante dans le sens des droits de la personne détenue, avant de constater dans une seconde partie que l’administration pénitentiaire bénéficie toujours d’une certaine marge