Le juge administratif
«Serviteur de la loi, censeur des décrets », selon l’heureuse formule inventée par le Professeur R. Chapus pour déterminer la place du Conseil d’Etat, en tant que juge et jurislateur, dans la hiérarchie des sources formelles du droit administratif, le juge administratif n’en a pas moins jamais été totalement enfermé dans une telle fonction.
En tant que « censeur des décrets », actes administratifs par lesquels le Président de la République et le 1er Ministre exercent le pouvoir règlementaire, le Conseil d’Etat, seul juge, aujourd’hui encore, compétent pour en connaître en premier et dernier ressort, a très tôt admis l’idée que pour en apprécier la « légalité », il pouvait se référer à la Constitution. Le célèbre arrêt Labonne rendu en 1919 à propos de l’institution par le Chef de l’Etat du permis de conduire est là pour en attester. Rien ne s’y opposait, et ne s’y oppose aujourd’hui, tout simplement en raison de ce que celle-ci édicte de très nombreuses normes à destination de l’exécutif et donc de l’Administration et qu’il entre incontestablement dans sa fonction de juge de les faire respecter. Mieux même, aujourd’hui, il y est contraint par le principe de constitutionnalité. Rien ne s’y opposait, si ce n’est le fait que très souvent, ente la Constitution et l’acte administratif pouvait s’interposer une loi dont il pouvait tirer son inconstitutionnalité. Dans ces conditions, d’abord « serviteur de la loi » dont il détient, aujourd’hui encore pour l’essentiel, ses attributions juridictionnelles, le juge administratif ne pouvait que laisser le dernier mot à cette dernière. En conséquence, il ne pouvait, et ne peut que rejeter, en tant qu’inutilement soulevé devant lui, le moyen tiré, à l’encontre de la juridicité de l’acte pris pour l’application d’une norme législative, de sa non-conformité par rapport à la norme suprême. La consécration par le Conseil Constitutionnel sous forme