Le moment réaliste du roman
S. Triaire
Daunais Isabelle, Frontière du roman. Le personnage réaliste et ses fictions, Montréal-Paris, Presses de l'Université de Montréal, Presses Universitaires de Vincennes, Collection " espace littéraire ". 2002, 241 pages, N° ISBN 2- 84292-125-9. Prix : 21,50 Euros
Jusqu'où le roman peut-il creuser l'évidement de la fiction qui caractérise son oeuvre au cours des années glorieuses — pour le genre — du réalisme ? Et selon quels choix, arrivé aux limites de ce qui le fonde – déployer dans le temps une aventure aussi ténue soit-elle –, va-t-il se séparer d'une " modernité " que la peinture, elle, radicalise dans son invention de l'abstraction ? Telles sont les questions que traite l'ouvrage d'Isabelle Daunais, Frontière du roman. Le personnage réaliste et ses fictions.
Enjeux théoriques
L'auteur étudie le moment réaliste du roman en l'inscrivant dans une histoire interne du genre, en tant que le roman réaliste conduit à ses limites le rapport entre fiction et monde réel, rapport inhérent à l'existence du roman. Le roman réaliste joue en effet à réduire la distance entre fiction et réalité, au point d'atteindre à des limites où se met en péril le devenir du roman. L'ouvrage analyse ainsi les choix romanesques de la seconde moitié du XIXe siècle, pour y trouver les causes des formes spécifiques prises par le roman au XXe siècle. S'appuyant sur les postulats de la fiction romanesque depuis ses origines (Don Quichotte ou Robinson), puis au cours du XVIIIe siècle, enfin sur le rôle joué par la poussée romantique, l'ouvrage donne pour problématique ceci, que le roman se définit, depuis son apparition, par " le mouvement de la fiction vers la réalité ", c'est-à-dire par la " réduction " de la distance classique qui assurait l'étanchéité entre imaginaire et réalité. Isabelle Daunais part du postulat que le réalisme a " reçu comme question à résoudre " celle de la fin de cette distance que le romantisme, et Balzac en son oeuvre, ont